3 janvier 2010
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23:16
Bon, alors déjà, remarque préliminaire, qui n'a rien à voir avec le bouquin, mais juste pour mettre les choses au clair définitivement.
Un pingouin, c'est ça :
Le reste, c'est des manchots, pas des pingouins :
Le Pingouin (le livre, cette fois) est une sorte de livre policier, premier volet d'un diptyque et peut-être d'une série, écrit par un écrivain ukrainien de langue russe, Andreï Kourkov. Il met en scène Victor (on n'apprendra son patronyme et son nom qu'à la fin du livre), un journaliste-écrivain raté, qui vit avec un manchot royal (le fameux "pingouin" - ça ira pour cette fois, mais que je ne vous y reprenne plus) et à qui on propose un jour d'écrire la nécrologie de personnes qui ne sont pas encore mortes.
Jusque-là, tout est normal, c'est la manière de procéder classique des journaux pour ne pas être pris de court par le décès de personnes célèbres.
Sauf que, d'une part, il ne s'agit pas toujours ici de personnes célèbres, et surtout, un jour, ces personnes se mettent d'un coup à mourir en série.
Extrait 1 :
"Micha, qui observait son maître accroupi, plongé dans ses pensées, se rapprocha et, de son bec froid, lui cogna doucement le cou. Victor sursauta. La tendresse fraîche du pingouin le tira de ses réflexions, il le caressa, soupira, se releva et regarda dehors.
Telles des cases de mots croisés, les fenêtres de l'immeuble d'en face se dessinaient dans la nuit. Elles comportaient de nombreuses lettres. Victor contemplait ces témoignages de vies ordinaires. Il était triste, mais le silence le réconfortait, et il fut peu à peu gagné par un grand calme, étrange, presque douloureux, comme avant un orage. Les paumes plaquées sur l'appui froid de la fenêtre et les jambes collées au radiateur chaud, il attendait que cette sensation le quitte, conscient de son aspect éphémère."
D'une certaine façon, même si c'est le hasard qui les a réunis, Victor ressemble un peu à son manchot. Il est contemplatif, mélancolique, et subit les événements en essayer le plus possible d'éviter de les comprendre - jusqu'à ce qu'ils viennent mettre en cause son petit monde clos. Le décor de l'Ukraine post-communiste met aux prises Victor avec des mafias qui sont en réalité les seules à agir dans le roman, contre elles-mêmes sans le savoir. Victor ne fait que deviner, avec regret, qu'il devient peu à peu un réel acteur de cette macabre comédie. Aspiré par cette spirale de disparitions, il lutte pour garder sa passivité jusqu'au bout, comme si agir, c'était mourir un peu.
Pour son manchot Micha, et pour tout ce qu'il lui apporte par sa simple présence, Victor va devoir devenir incarner le personnage d'acteur qu'on a taillé pour lui.
Extrait 2 :
"Il fit une pause qui se prolongea. Il regardait par la fenêtre. Victor, fébrile, tentait d'assimiler ce qu'il venait d'entendre.
- Dis, demanda-t-il enfin, le meurtre de la maîtresse, j'y suis aussi... pour quelque chose ?
- T'as pas compris, prononça calmement Micha, qui avait adopté un ton d'instituteur. Nous avons enlevé la carte qui soutenait tout le château, et ce qui s'est passé ensuite n'est que la conséquence logique : l'édifice entier s'écroule. Il faudra attendre que la poussière retombe.
- Moi aussi il me faudra attendre ? demanda Victor, non sans angoisse.
Micha haussa les épaules.
- Chacun sa merde, dit-il en se versant un nouveau cognac. Mais ne t'en fais pas. Je crois que tu es bien protégé... C'est pour ça que je suis venu te chercher toi...
- Protégé par qui ?
Micha écarta les mains en signe d'ignorance.
- Je t'ai dit ce que je savais. Je le sens, c'est tout. Si tu n'étais pas protégé, tu ne serais plus là..."
Le Pingouin ressemble à un roman d'introduction. On apprend à connaître Victor, et par lui, par les événements qu'il génère malgré lui, on voit comme par la fenêtre l'Ukraine qui passe... La suite promet beaucoup.
Note : 3 Rv sur 5
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Andre%C3%AF_Kourkov
Un pingouin, c'est ça :
Le reste, c'est des manchots, pas des pingouins :
Le Pingouin (le livre, cette fois) est une sorte de livre policier, premier volet d'un diptyque et peut-être d'une série, écrit par un écrivain ukrainien de langue russe, Andreï Kourkov. Il met en scène Victor (on n'apprendra son patronyme et son nom qu'à la fin du livre), un journaliste-écrivain raté, qui vit avec un manchot royal (le fameux "pingouin" - ça ira pour cette fois, mais que je ne vous y reprenne plus) et à qui on propose un jour d'écrire la nécrologie de personnes qui ne sont pas encore mortes.
Jusque-là, tout est normal, c'est la manière de procéder classique des journaux pour ne pas être pris de court par le décès de personnes célèbres.
Sauf que, d'une part, il ne s'agit pas toujours ici de personnes célèbres, et surtout, un jour, ces personnes se mettent d'un coup à mourir en série.
Extrait 1 :
"Micha, qui observait son maître accroupi, plongé dans ses pensées, se rapprocha et, de son bec froid, lui cogna doucement le cou. Victor sursauta. La tendresse fraîche du pingouin le tira de ses réflexions, il le caressa, soupira, se releva et regarda dehors.
Telles des cases de mots croisés, les fenêtres de l'immeuble d'en face se dessinaient dans la nuit. Elles comportaient de nombreuses lettres. Victor contemplait ces témoignages de vies ordinaires. Il était triste, mais le silence le réconfortait, et il fut peu à peu gagné par un grand calme, étrange, presque douloureux, comme avant un orage. Les paumes plaquées sur l'appui froid de la fenêtre et les jambes collées au radiateur chaud, il attendait que cette sensation le quitte, conscient de son aspect éphémère."
D'une certaine façon, même si c'est le hasard qui les a réunis, Victor ressemble un peu à son manchot. Il est contemplatif, mélancolique, et subit les événements en essayer le plus possible d'éviter de les comprendre - jusqu'à ce qu'ils viennent mettre en cause son petit monde clos. Le décor de l'Ukraine post-communiste met aux prises Victor avec des mafias qui sont en réalité les seules à agir dans le roman, contre elles-mêmes sans le savoir. Victor ne fait que deviner, avec regret, qu'il devient peu à peu un réel acteur de cette macabre comédie. Aspiré par cette spirale de disparitions, il lutte pour garder sa passivité jusqu'au bout, comme si agir, c'était mourir un peu.
Pour son manchot Micha, et pour tout ce qu'il lui apporte par sa simple présence, Victor va devoir devenir incarner le personnage d'acteur qu'on a taillé pour lui.
Extrait 2 :
"Il fit une pause qui se prolongea. Il regardait par la fenêtre. Victor, fébrile, tentait d'assimiler ce qu'il venait d'entendre.
- Dis, demanda-t-il enfin, le meurtre de la maîtresse, j'y suis aussi... pour quelque chose ?
- T'as pas compris, prononça calmement Micha, qui avait adopté un ton d'instituteur. Nous avons enlevé la carte qui soutenait tout le château, et ce qui s'est passé ensuite n'est que la conséquence logique : l'édifice entier s'écroule. Il faudra attendre que la poussière retombe.
- Moi aussi il me faudra attendre ? demanda Victor, non sans angoisse.
Micha haussa les épaules.
- Chacun sa merde, dit-il en se versant un nouveau cognac. Mais ne t'en fais pas. Je crois que tu es bien protégé... C'est pour ça que je suis venu te chercher toi...
- Protégé par qui ?
Micha écarta les mains en signe d'ignorance.
- Je t'ai dit ce que je savais. Je le sens, c'est tout. Si tu n'étais pas protégé, tu ne serais plus là..."
Le Pingouin ressemble à un roman d'introduction. On apprend à connaître Victor, et par lui, par les événements qu'il génère malgré lui, on voit comme par la fenêtre l'Ukraine qui passe... La suite promet beaucoup.
Note : 3 Rv sur 5
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Andre%C3%AF_Kourkov